NUIT
 
     Toute la nuit durant, les amours traînent
leur lassitude sur les routes,
par les fenêtres lentement la douleur goutte,
que les volets retiennent.
 
Dessus les toits s’est accrochée la lune
versant des larmes de détresse,
et des roses d’ici l’odorante tristesse
s’en va dans la nuit brune.
 
Le dos bien droit, blême, le réverbère
garde, mystérieux, le silence,
et ma porte s’ouvrant, on dirait que s’avance
un mort, pour qu’on l’enterre.
 
Le lit couvrant de sarcasmes leur joie,
ces gens-là, naïfs, s’imaginent
qu’il grince. Ils n’ont pas vu ce que le lit devine:
la mort qu’on leur envoie.
 
Dans les tavernes, des voix attendries
pleurent la nuit et ses étoiles
que l’amour devrait boire, et partout se trimbale
l’orgue de barbarie.
 
Et les oublis délectables attendent,
qu’on nous a versés dans nos verres;
voici venir l’instant où parlent les chimères
afin que tous entendent.
 
De nos malheurs quotidiens cimetière
le jardin public est fébrile,
quand soudain le traverse un mort qui va, tranquille
 
dormir dans la bruyère.
Traduction: Michel Volkovitch
     Peinture: Takis Eleftheriadis 
 
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