Le littoral de l’île de beauté garde les traces d’une histoire particulière. Celle de l’exode de plusieurs centaines de Grecs, et de durs sacrifices.

L’histoire de la communauté grecque de Corse commence en 1668. Les habitants de Vitylo dans le  Péloponnèse, alors attaqués sans relâche par les Turcs, se mettent d’accord pour abandonner leur terre ancestrale. Ils prennent la difficile décision de partir pour offrir la paix à leurs familles et à leurs descendants. Ils partiront, mais ce ne sera pas le seul exode nécessaire pour trouver une paix durable…

Le premier déracinement : une longue traversée de 97 jours

La République de Gênes, qui règne alors sur le territoire Corse, leur cède Paomia  – située à 50 km d’Ajaccio. Apostoli Stéphanopoli qui a enduré le périple entre la Grèce et la Corse raconte dans une lettre à sa famille les tourments du voyage vers l’exil: « A cause du navire trop petit, cent-vingt des nôtres sont morts entre grands et petits.» (En savoir plus)

Environ 700 Grecs arrivent le 14 mars 1676 sur leur nouvelle terre d’accueil. Les Génois fournissent aux réfugiés de quoi commencer une nouvelle vie : un bœuf par famille, des outils, du blé, de l’orge… Cette bienveillance du pouvoir génois auprès des nouveaux arrivants provoque des réactions hostiles du côté des voisins corses alors sous le joug de cette République qu’ils ne reconnaissent guère comme la leur.

L’insurrection corse : la fuite des Grecs vers Ajaccio

Des années de calme et de paix tant souhaitées par les Manïotes s’en suivent. Cependant la proximité des Grecs et de Gênes aura des répercussions sur cette colonie hellénique au moment de l’insurrection des Corses de 1728. Refusant de s’opposer au pouvoir qui leur a permis l’exil, les Grecs sont pris pour cible par les insurgés. Une centaine d’habitants de Paomia s’établissent dans la Tour Omnigia (cf photo) pour lutter contre les Corses et permettre à leurs familles de fuir. Un nouvel exode s’en suit pour environ 900 Grecs, leur nouveau foyer sera Ajaccio.

Troisième et dernier exode pour la communauté

L’île devient française quelques 40 années après l’insurrection corse. Le nouveau gouverneur propose un nouvel asile corse aux Grecs : Cargèse. Une ville qui garde surement le plus de traces de la culture grecque. Une culture amenée à se métisser considérablement à Cargèse. La langue grecque s’est éteinte petit à petit en Corse. Les sacrifices opérés par la colonie afin de « prouver » son intégration aux différents pouvoirs se sont en effet multipliés : abandon des costumes traditionnels, modification de leur clergé, changement des patronymes… Néanmoins, l’île de beauté conserve encore aujourd’hui, sur ces étapes de l’exil que sont Paomia, Ajaccio et Cargèse, quelques legs du Péloponnèse.

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