Caractérisé comme l’un des plus importants prosateurs de la génération des années ‘20, Stratis Myrivillis est né à l’île de Lesvos en 1890. Après des études secondaires dans son île natale, il poursuit des études supérieures à Athènes à la faculté des Lettres et à celle de Droit. Myrivillis a participé aux guerres balkaniques, il a été membre des forces armées du gouvernement de défense nationale d’Elefthérios Venizélos au moment de la Première Guerre Mondiale (1917) et a, également, participé à la guerre gréco-turque (1919-1922).

Myrivillis appartient à cette génération qui a été ‘’élevée’’ autour du débat de Jean Psichari pour la question linguistique grecque, une génération qui a vécu la renaissance de la nation grecque avec les guerres des Balkans et l’effondrement de la grande idée avec la catastrophe de l’Asie Mineure. Dans ses écrits, on voit clairement ses liens étroits avec la tradition, des liens qu’il n’abandonne jamais. Son discours est fiévreux mais il garde la chaleur de l’oral et il est riche en images et éléments lyriques. Son écriture oscille entre réalisme et un tendre lyrisme naturel.

Son premier livre, le recueil des nouvelles ‘’Histoires rouges’’ (Κόκκινες Ιστορίες) est publié en 1915. Dans cette première période de son parcours, il s’inspire du présent et du passé récent, de la vie à Mytilène.

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Mais c’est grâce à ses expériences vécues dans les tranchées lors de la Première Guerre mondiale que naît son œuvre célèbre ‘’La Vie dans la tombe’’ (Η ζωή εν τάφω) (1924). L’œuvre constitue un point culminant sur l’expression de l’esprit anti-guerre. ‘’La vie dans la tombe’’ est, dans la liturgie orthodoxe, l’hymne du Vendredi saint, déploration funèbre dans l’attente de la Résurrection. Pour Stratis Myrivilis, c’est l’enfer des tranchées durant la Grande Guerre. Le livre se présente comme le journal intime d’un jeune Grec de Mytilène (Lesbos), Antonis Cotsoulas, engagé volontaire sur le front d’Orient. Il retrace ses épreuves et son évolution intérieure, de l’élan juvénile initial à la désillusion d’un patriotisme lucide teinté d’antimilitarisme. Si l’auteur, pour ménager sa liberté d’expression, recourt aux artifices de la fiction, il n’emploie jamais le mot ‘’roman’’. Son livre est avant tout un témoignage d’un réalisme extrême sur la vie quotidienne dans les tranchées. Myrivilis décrit dans cette œuvre les expériences cauchemardesques et l’absurdité de la guerre qui transforme l’homme en animal, des expériences qui vont poursuivre l’écrivain tout au long de sa vie et qui vont hanter toute son œuvre. Le caractère autobiographique d’une part, et la volonté de garder l’objectivité de la narration des faits historiques d’autre part, font de l’œuvre un témoignage humain contre la cruauté et la mort.

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Membre de l’Académie d’Athènes (1958), romancier, journaliste et chroniqueur, un des esprits les plus vifs et les plus combatifs de sa génération, toujours en contact avec les événements de son époque, sans oublier ses lecteurs, Myrivillis meurt à Athènes en 1969. Sa vie est aussi marquée par les changements de ses points de vue politiques. Attiré par les idées progressistes au fil de sa jeunesse, il adhère aux idées de Ioannis Metaxas, au moment de la Dictature (1936), et après la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, il ne manque d’exprimer son anticommunisme farouche. Pour ce qui est de son œuvre, ceci a été caractérisée comme un ‘’ilot d’une vie provinciale pittoresque dans une prose bourgeoise ‘’ de la génération des années ’20, marquée souvent par un lyrisme impressionnant. S’inspirant de son quotidien, Myrivillis n’a fait qu’exprimer la cruauté du monde, le ‘’présent’’ douloureux et insupportable : ‘’la dure réalité de la vie qui nous entoure et qui nous blesse, nous épuise, nous fait mal’’.   

m.o