
Sur les flancs du rocher de l’Acropole, à l’extrémité sud-ouest de Plaka et près de la place Monastiraki, un quartier magique, qui a été préservé à nos jours, abrite le Musée de la Culture Grecque Moderne, récemment rénové. Dans ce quartier, au cœur du centre historique d’Athènes, des maisons néoclassiques et traditionnels de l’habitat athénien encadrés par des cours intérieures et des allées coexistent avec des monuments et des vestiges archéologiques.
Dans un complexe de 4 000 mètres carrés, dix-huit bâtiments du XIXe et du début du XXe siècle accueillent chacun une section thématique qui se réfère à une facette de la culture grecque moderne, créant ainsi un paysage culturel particulier qui traverse et prolonge le tissu urbain plus large d’Athènes historique. Les bâtiments du complexe abritent la nouvelle exposition permanente du musée avec environ 3 000 objets du patrimoine culturel matériel et immatériel de la Grèce datant du XVIIIe siècle aux années 1970 et présentant la culture grecque moderne de manière globale.

L’exposition s’articule sur les sections thématiques couvrant la religion, le logement, le travail, la nutrition, le divertissement, la vie des femmes, les vêtements etc. incluant des objets tels que des vêtements traditionnels, des ustensiles utilisés dans la vie quotidienne, des jouets fabriqués à la main, des icônes religieuses, des broderies, des marionnettes d’ombre « Karagiozis », ainsi que des fresques réalisées par Théophilos, l’artiste folklorique grec le plus renommé.
Des expositions numériques et un riche matériel visuel, des coins pour les familles, des bâtiments pour les programmes éducatifs, les expositions temporaires et l’accueil d’événements, un théâtre en plein air, des zones de repos et de loisirs, une salle de rafraîchissement et une boutique, composent l’image d’un musée moderne doté d’une identité unique.

Le musée, fondé en 1918 et installé à cette époque-là dans la mosquée Tzisdarakis à Monastiraki, est le seul musée métropolitain public du ministère de la Culture qui traite du passé récent de l’ensemble de la Grèce et des preuves matérielles de sa culture. Au cours de sa longue histoire, le musée a changé de nom plusieurs fois – Musée de l’artisanat grec au début, renommé ensuite Musée des Arts Populaires Grecs – reflétant ainsi chaque fois sa vision et sa perspective dans le cadre culturel de l’époque.
Vers un musée anthropocentrique
Pendant de nombreuses décennies, les objets de la vie populaire – vêtements, bijoux, broderies, textiles, céramiques, etc. – ont été admirés et conservés pour leur valeur esthétique et artistique et pour leur capacité à « prouver » la continuité historique ininterrompue de l’hellénisme depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours. L’art populaire est le concept qui a dominé l’approche de la recherche et la narration du musée.

Depuis quelques années, l’approche du musée en matière de collection et d’interprétation des objets a considérablement changé devenant plutôt anthropocentrique. L’accent est désormais mis sur la personne qui se trouve « derrière » l’objet. Sans négliger leur dimension esthétique, les objets sont également reconnus comme des témoignages de la vie des personnes qui les ont fabriqués et utilisés. L’objectif est de les intégrer dans leur contexte historique et de les utiliser comme un moyen de comprendre et de mettre en lumière divers aspects de la culture grecque moderne. Leur forme et leur histoire permettent de retracer les chemins complexes de la formation de l’identité grecque moderne.

En outre, les collections et les expositions du musée comprennent désormais des objets d’un passé plus récent, importants surtout pour leur lien avec la vie quotidienne d’un hier récent mais différent. Des objets représentatifs du mode de vie urbain, tel qu’il a été façonné et s’est imposé principalement après la Seconde Guerre mondiale, sont ainsi impliqués dans une conversation intéressante avec les vestiges matériels des sociétés agricoles et des premières sociétés urbaines des 19e et 20e siècles.

Dans ce contexte, la recherche muséale se concentre sur la documentation multiforme des objets collectés et sur la collecte de toutes sortes de matériel pertinent (photographies, documents, films, etc.). La numérisation et la gestion électronique de ce matériel diversifié facilitent son utilisation dans le cadre des activités d’exposition, éducatives et autres du musée.
Les bâtiments du musée
Le musée de la culture grecque moderne est situé à Monastiraki, au cœur du centre historique d’Athènes, dans le quartier défini par les rues Adrianos – Areos – Kladou et Vrysakiou. Ici, la longue histoire de la ville se déploie dans une mosaïque de vestiges de bâtiments : les parties de la muraille romaine tardive construite par les Athéniens après le raid des Hérules (267 après J.-C.) pour protéger leur ville, l’église byzantine d’Agios Thomas, une basilique à trois nefs du 6e – 7e siècle après J.-C, la porte et l’escalier de du manoir de Chomatianos – Logothetis, un bâtiment typique de la première moitié du 18e siècle, l’église restaurée d’Agios Eliseios, l’église héréditaire de la famille de Chomatianos – Logothetis, où le « saint des lettres », Alexandros Papadiamantis, avait l’habitude de chanter des psaumes lors des veillées, la maison de Nikolaos Dragoumis, mais aussi des bâtiments plus récents avec des éléments de la période Ottonienne et de l’architecture folklorique.

La mosquée de Tzisdaraki
La mosquée de Tzisdaraki, monument emblématique de la fin de la période ottomane sur la place Monastiraki, est un élément dynamique de l’exposition permanente du musée, puisqu’elle accueille l’une des dix principales sections thématiques de l’exposition. Construite en 1759 par le voïvode d’Athènes, Tzisdarakis, elle a été utilisée, après la création de l’État grec, tantôt comme caserne militaire, tantôt comme prison et entrepôt. En 1915, elle a été restaurée par Anastasios Orlandos pour abriter le nouveau musée en 1918.

La mosquée Tzisdarakis, qui est conceptuellement lié au récit muséologique du musée, abrite la section traitant l’histoire du musée, présentant sa naissance et son évolution, ainsi que le contexte culturel des différentes époques qui ont influencé sa politique de collecte. Depuis le premier objet acquis par le musée en 1918, un gilet du costume nuptial et festif féminin de Skyros fabriqué au XVIIe siècle en Asie Mineure, jusqu’aux dernières acquisitions de la collection, un ensemble d’objets de famille datant des années 1930 à 1970 d’une donatrice de 102 ans, des « souvenirs » de sa famille qui constituent un petit « trésor » de la mémoire.

George E. Koronaios, CC BY-SA 4.0, via Wikimedia Commons
La section traite des deux composantes fondamentales de l’historicité qui structurent, entre autres, l’identité, le lieu et le temps de l’histoire grecque moderne. À travers des objets disparates, qui fonctionnent comme des marques de fabrique, des souvenirs de voyage ou des héritages, les visiteurs peuvent naviguer à travers les patries particulières des Grecs modernes et voir comment les grandes étapes historiques sont inscrites dans des objets d’usage quotidien, tels qu’une broderie ou un timbre.
Le bain des Vents
Le Bain des Vents (“To Loutro ton aeridon” en grec) , monument de l’époque moderne, est le seul des bains publics d’Athènes à avoir survécu jusqu’à aujourd’hui. Il date de la première période de la domination ottomane en Grèce et est situé près de l’Agora romaine et de l’horloge de Kyrrestos. Il a fonctionné comme bain jusqu’en 1965. Depuis 1998, date à laquelle sa restauration a été achevée, il est sous la juridiction du Musée de la culture grecque moderne, qui est responsable de sa nouvelle utilisation en tant que musée sur le thème de la propreté, des soins et de la toilette du corps dans une perspective intemporelle. C’était un lieu spécial de convergence culturelle, un point de rencontre intemporel de personnes et de cultures, un lieu de purification et de relaxation des corps et des âmes.

En tant que monument architectural, le bain a subi plusieurs modifications et extensions au cours de sa longue existence. Pendant les années d’occupation ottomane, il s’agissait d’un bâtiment d’une seule pièce, ouvert à tour de rôle aux hommes et aux femmes à différentes heures de la journée. Au cours de la deuxième phase de construction, vers 1870, il a été transformé en un bâtiment jumeau, offrant des sections séparées pour les hommes et les femmes. Plus tard, un bâtiment auxiliaire a été ajouté, qui comprenait des bains individuels appelés « bains européens ».
Aujourd’hui, les locaux de l’établissement de bains sont utilisés pour des expositions périodiques, des représentations musicales et théâtrales, des contes et d’autres événements, ainsi que pour des programmes éducatifs. Le caractère monumental du site devient le contexte, l’occasion et l’inspiration pour des activités artistiques intéressantes et des expériences esthétiques.
Le bâtiment au 22 rue Panos
Le bâtiment situé au 22 rue Panos, où se tient l’exposition permanente « Des hommes et des outils. Aspects du travail dans la société préindustrielle », est un simple bâtiment de deux étages datant du XIXe siècle, qui a appartenu à Maria Ioannidou, originaire d’Égypte. L’exposition présente les outils d’avant l’industrie et les personnes qui ont travaillé avec eux, et tente de mettre en lumière des aspects du travail des personnes qui ont vécu et travaillé dans les termes d’une autre « réalité », très proche, mais aussi très éloignée de la nôtre.

Textes, photographies, documents d’archives rares, témoignages authentiques d’artisans et expositions interactives créent un environnement d’exposition complexe et des conditions propices à de nombreuses lectures et interprétations différentes de la part du visiteur.
Photos par le site web et la page FB du Musée
Lire aussi sur GrèceHebdo
Vrysaki, le quartier de la vieille Athènes qui a été sacrifié pour mettre en lumière l’Agora classique
Peintres grecs: Théophilos, la création naive d’un autodidacte
L’histoire de Karaghiozis, une figure satirique du théâtre d’ombres
Une brève histoire du joyau grec
Le potentiel de l’artisanat grec dans la société et l’économie
L’histoire millénaire de l’art de la céramique en Grèce
IE
TAGS: Culture | Grèce | histoire | patrimoine