Theodoros Papadimitriou (1931-2018), connu sous le nom de Theodoros, est considéré comme l’un des sculpteurs grecs les plus novateurs et influents du XXe siècle. Son œuvre, ancrée dans la réflexion sur l’espace public et la relation entre l’art, la société et la mémoire, est présentée au Musée national d’art contemporain d’Athènes (EMST) jusqu’en février 2026 sous le titre : Theodoros, In Lieu of a Retrospective.

Theodoros, années 1950, source: archive ELIA/MIET
Formation, débuts et héritage
Theodoros a étudié à l’École des Beaux-Arts d’Athènes entre 1952 et 1957, où il fut l’élève de Yannis Pappas et de Yannis Moralis. Grâce à une bourse de l’État grec, il poursuit ses études à Paris, à l’École nationale supérieure des Beaux-Arts et à l’Académie du Feu, où il découvre les grands courants de l’avant-garde européenne d’après-guerre.

Atelier du professeur Michalis Tobros à l’École des beaux-arts d’Athènes 1956-1957. Théodoros est à droite sur la photo. Source: Theodoros.net
C’est à Paris qu’il commence à exposer, tout en collaborant avec des architectes et des metteurs en scène. L’influence de la pensée française — notamment celle de Sartre et de Merleau-Ponty — marquera profondément son approche de la sculpture comme acte de communication et d’intervention dans l’espace social.

Theodoros (1931-2018), Christos Karas (1930-2023) et Gerasimos Sklavos (1927-1967) à l’exposition ‘Peintres et Sculpteures Grecs de Paris’ au Musée d’Art Moderne de Paris, 1962.. Source : Instagram/Theodoros
En 1961, il expose pour la première fois au Salon des Réalités Nouvelles au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris. Sa présence active dans des expositions collectives et internationales se poursuit ayant également présenté de nombreuses expositions personnelles en Grèce et à l’étranger.
De retour en Grèce après la chute de la dictature, Theodoros enseigne à la Faculté d’architecture du Politechnio d’Athènes (E.M.P.) à partir de 1980, formant plusieurs générations d’artistes et d’architectes. . En 1992, une rétrospective de son œuvre a été organisée à la Galerie Nationale d’Athènes.
Il a aussi écrit de nombreux textes et manifestes, où il défendait une vision de l’art comme acte politique et poétique. Pour lui, la sculpture devait être un instrument de communication entre l’homme, la mémoire et l’espace.

Artificial Sun Catapult, 1967. Source: Theodoros.net
Une œuvre entre matière et idée
Theodoros n’a jamais cessé d’expérimenter les matériaux : acier, bronze, pierre, verre, plexiglas, bois, corde, tissu, caoutchouc, mais aussi des éléments naturels comme l’eau, le feu, le sable.
Un des thèmes centraux de son œuvre est la revalorisation du rôle de l’art dans l’espace public. Pour Theodoros, la sculpture doit dialoguer avec la ville et ses habitants et a laissé derrière lui une œuvre dense, à la croisée de l’art, de la philosophie et de la science. Son approche multidisciplinaire et sa pensée critique ont marqué durablement la scène artistique grecque contemporaine.
Ses œuvres sont présentes dans des musées, espaces publics et collections privées en Grèce, en France et dans d’autres pays d’Europe.


«Vue depuis la fenêtre », Agrinion, 1954 et Théodoros pendant la construction de l’horloge du métro Syntagma, 2001. Source: Theodoros.net
Exposition : “Theodoros, In Lieu of a Retrospective” à l’EMST
Depuis le 8 février 2025 jusqu’au 8 février 2026, le Musée national d’art contemporain d’Athènes (EMST) présente une exposition majeure intitulée Theodoros, In Lieu of a Retrospective.
Cette exposition est la première tentative posthume de donner une vision d’ensemble du travail de Theodoros. Elle réunit non seulement de nombreuses œuvres représentatives, mais aussi une grande partie des archives que l’artiste a léguées à l’EMST.
On y découvre, outre ses sculptures traditionnelles, des œuvres plus expérimentales : performances, sculptures sonores, œuvres conceptuelles. L’un des aspects originaux de l’exposition est sa mise en espace : plutôt que de présenter Theodoros comme figure isolée dans le temps, on associe son œuvre à celle de cinq artistes grecs contemporains (Nikos Arvanitis, Paky Vlassopoulou, Iris et Leda Lykourioti (A Whale’s Architects), Kostas Bassanos, Yiannis Papadopoulos), dans un dialogue intergénérationnel autour des thèmes qu’il explorait lui-même, comme le rôle critique des institutions ou l’engagement social de l’artiste.
Enfin, l’exposition questionne explicitement les limites d’une rétrospective traditionnelle — centrée sur l’artiste et tournée vers le passé — et propose une lecture de son œuvre en tant que potentiel toujours à émettre, ouvert au devenir.

Vue de l’exposition Theodoros, In Lieu of a Retrospective. Source: EMST
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M.V.