Certes Athènes me charme par l’abondance de délices visuels, musicaux et gustatifs que cette ville peut offrir, mais aussi et surtout grâce aux rencontres insolites qui peuplent mon quotidien ici.
Dimitris Messinis en est un bon exemple. Directeur de la photographie de l’agence Associated Press d’Athènes pour la région sud-européenne, cet aventurier de la photo m’a fait découvrir un milieu fascinant, celui du photojournalisme. Dimitri Messinis est grec mais a vécu treize ans en France à Annecy, ce qui a tout de suite facilité notre rencontre, et qui m’a permis de mieux le connaître. J’apprends alors que c’est en 1973 qu’il quitte la France ainsi que les bureaux de la banque dans laquelle il travaille pour retrouver ses racines grecques et se lancer dans sa passion pour la photo.

Si aujourd’hui il occupe un poste de coordinateur dans les locaux d’Associated Press à Athènes, autrefois il était sur le terrain pendant dix mois sur douze. Ainsi, il a voyagé presque autant que le Pape, environ 98 pays sont passés sous son objectif. A cette époque où il allait de pays en pays pour illustrer l’actualité, avec une seule idée en tête « montrer ce que l’on voit ici », le métier était totalement différent que celui des photoreporters d’aujourd’hui.

En effet, le passage de l’argentique au numérique est une révolution technologique qui a totalement transformé le photojournalisme. Avec l’argentique il fallait transporter des kilos de matériel, improviser des chambres noires dans sa chambre d’hôtel, choisir la bonne photo pour ne pas gaspiller de pellicule…Ce qui nécessitait de grandes aptitudes d’adaptation au terrain, d’improvisation et surtout de sélection. Avec le numérique cette démarche a disparu, aujourd’hui le photographe peut voyager léger et surtout prendre un nombre quasiment infini de photos. Ainsi la sélection est désormais la tâche de l’éditeur photo. Le numérique a démultiplié la rapidité et la liberté du déplacement sur le terrain, ce qui offre plus de photos, plus de choix… Et cette abondance d’images entraine inévitablement une concurrence féroce entre les agences de presse.

En outre, aujourd’hui on trouve un phénomène de « photographes du mois de décembre » comme Dimitris les appelle, c’est-à-dire ceux qui courent après les récompenses et autres prix décernés en décembre. Il n’est pas contre ces décorations honorifiques, qu’il a d’ailleurs connu plusieurs fois mais il regrette les effets collatéraux sur la qualité du travail. Cette course aux prix encourage à la recherche de la photo artistique qui va plaire et incite à dénaturer la réalité. Or, le photojournalisme c’est illustrer la réalité.

Joséphine Faisant, étudiante en journalisme à Paris, effectue un stage au sein de la rédaction de GrèceHebdo.

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