
Le papyrus de Derveni, le plus ancien livre conservé en Europe, a été inscrit au registre international « Mémoire du monde » de l’UNESCO en 2015. Faisant partie des découvertes les plus rares en Grèce- puisque le climat du pays n’est pas propice à la préservation de ce matériel- le papyrus de Derveni est l’une des pièces les plus précieuses du musée archéologique de Thessalonique. Le papyrus, qui a survécu parce qu’il était carbonisé, a été trouvé en 1962 dans la tombe à ciste A du cimetière de Derveni, près de Thessalonique, parmi les restes du bûcher funéraire. Les archéologues Petros Themelis et Maria Siganidou ont retrouvé les parties supérieures du rouleau de papyrus carbonisé et des fragments de cendres sur les dalles de la tombe ; les parties inférieures avaient brûlé dans le bûcher funéraire. (photo de couverture © Orestis Kourakis)
L’écriture du papyrus date de 340 à 320 avant J.-C., bien que l’œuvre originale qu’il copie soit en fait bien plus ancienne – datant approximativement de 420 à 410 avant J.-C.. Le texte est écrit en colonnes, dont 26 ont été restaurées, et est divisé en deux parties. Il présente un mélange de dialectes grecs anciens, principalement un mélange d’attique et d’ionique, avec parfois des formes doriques. Dans certains cas, le même mot apparaît dans différentes variantes dialectales.

Le livre contient l’enseignement eschatologique d’un « mantis » (prophète religieux, en grec). Le contenu est partagé entre des instructions religieuses sur les sacrifices aux dieux et aux âmes, et le commentaire allégorique d’un poème théogonique attribué à Orphée (probablement un hymne orphique qui accompagnait les cérémonies des mystiques, car le livre leur était initialement destiné). La vision de l’auteur est philosophique, affichant notamment un système physique proche de ceux d’Anaxagore, des Atomistes et de Diogène d’Apollonie. Sa méthode d’interprétation allégorique est particulièrement intéressante, rappelant souvent les acrobaties mentales et étymologiques ludiques de Socrate dans le Cratyle de Platon.
L’identification de l’auteur fait l’objet d’une controverse parmi les spécialistes, mais il s’agit probablement d’Euthyphro(n) de Prospalta, une communauté de l’Attique. Le débat entre Euthyphron et Socrate a influencé des générations de théologiens et a donné naissance à la question de la relation entre Dieu et la morale, connue sous le nom de dilemme d’Euthyphron : « Le saint (τὸ ὅσιον) est-il aimé des dieux parce qu’il est saint, ou est-il saint parce qu’il est aimé des dieux ? » ? Diagoras de Mélos et Stésimbrote de Thasos ont également été proposés, mais avec plus ou moins de vraisemblance. (Source : The Center for Hellenic Studies, Harvard University, Archaeological Museum of Thessaloniki, wikipedia.org)

Selon l’UNESCO, le papyrus de Derveni est d’une importance mondiale non seulement pour l’étude de la religion grecque et de la philosophie, qui est la base de la pensée philosophique occidentale, mais aussi parce qu’il sert de preuve pour la datation initiale des poèmes orphiques offrant une version distincte de celle des philosophes présocratiques. Le texte du papyrus, qui est le premier livre de tradition occidentale, a une importance mondiale dans la mesure où il reflète les valeurs humaines universelles : le besoin d’expliquer le monde, le désir d’appartenir à une société humaine avec des règles préétablies et la souffrance face à la finitude. (Source : UNESCO).

Derveni, 15 janvier 1962 : lors de l’élargissement de l’autoroute Thessaloniki-Kavala, une excavatrice mécanique heurte les murs d’une tombe à ciste, « suffocante et pleine » de précieux objets funéraires, comme le décrit dans sa publication Petros Themelis, excavateur du site. Au total, six tombes – dont des tombes à fosse, des tombes à ciste et une construction de type macédonien – ont été découvertes en 1962 dans la région de Derveni, à 10 km au nord-ouest de Thessalonique. Certaines d’entre elles n’ont pas été pillées. Elles contenaient des incinérations d’hommes et de femmes et des sépultures avec de riches offrandes, datées du dernier quart du IVe siècle av. Les découvertes les plus précieuses sont présentées dans l’exposition permanente « L’or de Macédoine » au musée archéologique de Thessalonique.
La tombe A de Derveni – une tombe à ciste – contenait un cratère en bronze avec les cendres des morts, une couronne en or, plusieurs vases en bronze, des pointes de lance en fer. Le papyrus de Derveni a été retrouvé brûlé dans l’épaisse couche de cendres provenant du bûcher de crémation et recouvrant les dalles de la tombe. (Source : odysseus.gr)

La tombe B de Derveni est la plus importante en taille et la plus riche en offrandes. Elle a été construite pour accueillir les cendres d’un homme et d’une jeune femme. Pour ce faire, le cratère de Derveni avec des scènes dionysiaques, unique dans l’histoire de l’art, a été utilisé. Dans la tombe, vingt vases en argent ont également été découverts, ainsi que de nombreux vases en bronze et en albâtre, des poteries, des armes en fer et des fragments d’un corselet en cuir. On a également trouvé une paire de cretons en bronze et un triobole en or de Philippe II. (Source : odysseus.gr)




Texte original: GreekNewsAgenda
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